Coup de cœur des Clubs Hors Concours 2022–2023

Paroles de CATHY BORIE

Qu'est-ce que l'écriture représente pour vous ?

L’écriture a toujours fait partie de ma vie. Dès que j’ai su lire, j’ai eu envie d’écrire des histoires, de créer des univers, d’inventer des personnages. Au départ, c’était une façon de m’échapper dans des mondes multiples, sans avoir besoin de prendre un livre puisque je pouvais le réaliser moi-même.
Et puis est venue l’envie de partager ces mondes avec les autres, de provoquer des émotions aussi fortes que celles que je ressentais, de faire naître des questions comme celles que je me posais, d’entrouvrir des portes vers des espaces inconnus mais que l’on pouvait approcher et tenter de comprendre.
Et j’ai alors cherché à me faire publier, ce qui est arrivé très tard, mais qui m’a comblée !

Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre en particulier ?

Ce qui m’a poussée à écrire Ana est un évènement qui est arrivé à une personne proche et qui soulevait le problème du consentement dans le cadre des rapports sexuels homme/femme (je ne parle que de ce que je connais, mais j’imagine que d’autres cadres sont envisageables). Le sujet était une interrogation autour de cette « zone grise » qui se déploie entre le OUI et le NON, soit parce qu’on n’arrive pas à le dire, soit parce qu’on le dit mais pas clairement. Ce qui peut entraîner des situations de violence évidente ou plus larvée.
Quelques années auparavant, j’avais recueilli des témoignages (Il était une première fois, aux éditions Les Points sur les i) sur la première expérience sexuelle des filles, et j’avais été sidérée de constater que, sur les 12 ou 15 femmes interrogées (elles avaient entre 18 et 80 ans et donc la première expérience de certaines remontait parfois à longtemps), presque la moitié avait vécu cette première fois sous une forme de contrainte.
L’histoire d’Ana est aussi partie de ce constat, et j’ai essayé de raconter ce qui pouvait alors en découler, ce que la femme forcée pouvait devenir ensuite, comment elle organisait sa vie et son corps autour de ce souvenir, de cette cicatrice. Bien sûr, le roman décrit des situations extrêmes, mais je crois qu’elles sont toutes vraisemblables, même si la sexualité en 2023 est sans doute un peu différente de celle que je décris et qui se déroule… au siècle dernier :-) !

Quel message voulez-vous faire passer à vos lecteur·ices ?

Le message que je souhaite faire passer avec Ana est évidemment un message de tolérance, d’écoute, de bienveillance. L’histoire est très noire, mais elle est tout de même peuplée de personnages à la main tendue, comme Inès, Robin, ou même Lulu et Gracieuse qui, dans leur détresse, gardent encore un cœur ouvert et généreux. Pourtant, je ne suis pas naïve (mon âge ne me l’autorise plus !), et je ne suis pas très optimiste concernant notre société, ni même concernant l’humanité en général, qui fait passer la plupart du temps la marchandisation, la vénalité, bien avant l’amour du prochain. Mais je ne parviens pas à renoncer à croire qu’il y a, chez beaucoup d’entre nous, une petite lumière qui ne demande qu’à jaillir si l’occasion se présente… J’espère que des romans comme Ana attisent un tant soit peu cette flamme ?
Et si cela intéresse les lecteur·ices des clubs Hors Concours, je vous donne un mini-scoop : la suite de Ana est écrite et paraîtra fin 2023 (ou début 2024) !